Les considérations d'Eugène, chef de gare

Publié le par almanito

Et v'là t-y pas qu' ça r'commence la grande scène du quatre!
Ah!  C'te gamin, il en aura fait souffrir, des filles! Tous les ans la même chose, dans les derniers jours d'août, pouvez être sûr qu'il va s'amener sur le quai, une p'tite greluche en larmes pendue à ses basques.
Et des "je t'oublierai jamais mon amour" entre deux sanglots et des "je t'écrirai tous les jours" en s'agrippant à sa chemise...
Et le Paulo, il est là, i dit rin de rin, i r'garde sa montre toutes les deux minutes en cherchant  avec impatience au loin si le train arrive...
R'garde-moi ça! V'là maintenant qu'elle se pend à son cou et qu'elle l'embrasse et qu'elle chouine, la pauv' gosse...
Pff! Faut dire que maint'nant, les gamins, i font tout c'qui veulent, on les envoie en vacances à la campagne comme si ça coûtait rien, on les laisse complètement libres et pis voilà, avec ce sacré Paulo dans l'coin, ben c'est sûr que ça s'termine par du chagrin tout ça.
L'est ben comme son père, tiens, que toutes les femelles du village l'ont connu d'près, si vous voyez c'que j'veux dire... Sauf ma Mémène. Non, pour ça, j'crains rin, c'est pas qu'elle dirait pas non, notez bien, mais avec ses 90 kgs et son poireau en plein sur le nez, y a pas la demande. Moi j'y ai prise, la Mémène, rapport aux champs d'son père,  contigus au mien. C'était une belle affaire, pis quand i z'ont remembré les terres, là-haut à Paris, on a eu des sous pour abandonner la culture. Eh oui, c'est comme ça que du coup je fais chef de gare.
Alors Mémène et moi, comprenez bien que les chagrins d'amour et les scènes d'adieux qu'en finissent pas, ça nous fait un peu rigoler.
Mais j'aime ben r'garder, par curiosité, ça nous fait la conversation au dîner du soir devant la soupe.
Hein? Qu'est ce qu'elle lui chante maint'nant?..........
"Je n'ai jamais aimé un autre autant que toi...Tu es l'amour de ma vie...On était vraiment au diapason tous les deux..."
?! ...Diapason...? Où q'c'est donc, ça? J'connais point!  Non, pasque si y en a un qui connait l'coin, hein, c'est ben moi, j'suis natif, alors voyez! ...Mais Diapason, j'vois point, ça doit être encore un de ces dancigues comme ils disent pour que les jeunes s'amusent.
Allez, faut qu' jy aille, j'vois l'train qu'arrive et la p'tite qui va monter d'dans avec ses gros yeux rouges, alors que l'Paulo i pense déjà à la prochaine...
Diapason! Ha ha ha! Diapason, qu'est ce qu'i vont pas chercher d'nos jours, j'vous d'mande, un peu!

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É
Tu inventes des personnages truculents et j'adore ! Bon après midi Almanito
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I
C'est sûr qu'l'Eugène ne devait pas être amoureux fou de sa Mémène, il convoitait plus ses champs ! Paulo, c'était pas le coiffeur, le bô gosse ;)
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A
Je vois, je vois, madame a de la mémoire quand il s'agit de bô gosse :))
L
Atmosphère, atmosphère, quand tu nous tiens ... !<br /> le chef de gare, je le verrais bien avec la tête du beauf, de Cabu, mais version rurale. Dommage que je ne sache pas dessiner !
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A
:)) C'est tout à fait ça! Mais tu as ta plume pour t'exprimer, Loïc, on ne peut pas avoir tous les talents...
C
Ce qui est sûr en tous cas ... c'est que ça ne doit pas se passer en Corse !!! Bon un vrai bourreau des cœurs ce Paulo, et tant mieux pour Eugène, il est sûr de garder sa Mémène ! Tiens c'est amusant ... c'est comme sa que mon arrière-grand-père appelait ma grand-mère sa fille, Marie-Madeleine !<br /> Bon dimanche, bisous !<br /> Cathy
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C
J'ai découvert ce surnom sur une des cartes qu'il envoyait à ma grand-mère quand il était à Verdun, j'ai trouvé ça très touchant ...
A
L'accent n'est pas le même en Corse et il vaut aussi son pesant de folklore, mais des Paulo, y en a en pagaille.<br /> <br /> Décidément tu es la 2ème à me parler de ce petit nom charmant, Mémène:))
P
Alma, mais d'où te viennent toutes ces histoires ?<br /> Entre un vilain bourreau des coeurs et une pauvre Mémène bien enveloppée et qui a bien la droit d'aimer les poireaux.... si elle ne les mange pas.<br /> Ah je te jure ;-)<br /> Passe une bonne soirée
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A
Mais de ma fréquentation assidue avec les chefs de gare ma chère! :))
E
Euh... tu sais, mon papa surnomme ainsi ma maman, c'est étrange car elle se prénomme Carmèle.
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A
Ha!... Voui mais là, elle s'appelle Germaine, donc pas de confusion possible!
E
Ca sent l'vécu (omme ça, tu donnes le la) !
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A
Normal: Mémène, c'est moi!
P
Excellente vision de ces quais de gare lacrymaux, ce ne fut pas mon style, tu le devines, moi quand je voyais le mimi dans le train je faisais thoutchou avec la jupette.... mais je savais qu'il reviendrait et le Paulo c'est pas mon mimi. :)
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A
Ha je t'imagine très bien faire tchoutchou avec la jupette:))) l'ennui maintenant, c'est qu'avec les jeans qu'on porte toutes, ça le fait pas!
C
Trop forte !<br /> Je croirais entendre mon mari quand il revient de chez ses clients de l'Indre.
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C
Oui, mon mari, contrairement à moi, roule très bien les r (c'est son sang poitevin certainement).
A
Sympa pour ton mari! :)) Tu fais allusion à l'accent du terroir, j'espère:))
J
Excellent !... merci pour ces sourires et bon we à toi :-)
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A
Bon we Joëlle:)
D
C'est la grande forme, dis donc ! :D
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A
Je n'ai pas la fibre pour une grande scène rrromantique de séparation humectée de pleurs et de beaux sentiments, alors j'ai demandé à Eugène :))