L'allergie
J'ai toujours eu une tendance très marquée à la procrastination dès lors qu'il s'agit de répondre aux tracasseries administratives, espérant sans doute qu'à force de les ignorer, les ronds de cuir finissent par se lasser de mon incurie et m'oublier.
Mais ces gens amoureux du classement ne lâchent jamais rien, au contraire je crois bien qu'ils prennent plaisir à harceler les pauvres malheureux dans mon genre et j'ai fini par me retrouver envahie de correspondance menaçante me promettant l'huissier, la saisie, le poste de police, et pis encore le gel de mes allocs, le retrait de mon permis de conduire et tutti quanti.
Bref j'en arrivais au point que mon entourage compatissant s'organisa pour venir m'aider à retrouver la paperasse entassée au petit bonheur la chance dans mon petit chez moi où règne un foutoir pittoresque, mais rien n'y fit et la plupart abandonnèrent au bout de quelques jours de laborieuses mais infructueuses recherches.
Y a plus qu'un truc à tenter, ont déclaré mes amis, faut faire venir un scientifique capable d'aller fouiller là-haut où tout est numérisé!
L'idée était intéressante, certainement qu'on y trouverait les endroits où j'avais pu semer les divers dossiers que j'avais si légèrement dispersés et l'homme de l'art arriva dare-dare.
"Cherchez pas, docteur, c'est là-haut que ça se passe" firent mes amis en se frappant la tempe de l'index, geste fort désobligeant à mon égard.
Je vois, dit-il, faudrait envoyer des équipes miniaturisées en passant par le vestibule, c'est une solution moins invasive...
Je protestai illico: il n'était pas question que ses troupes de choc passent (et salissent) mon vestibule: ayant toujours eu l'ouïe ultra sensible et ne supportant déjà pas d'entendre mes voisins à l'étage au-dessus, je demandai à ce qu'on ouvre la boîte.
Le docteur acquiesça, dans le fond dit-il, ça sera plus simple et on aura une vue d'ensemble.
Je vous passe les détails de l'ouverture qui est assez pénible pour celui ou celle qui la subit, mais à peine mon crâne mis à nu, le docteur s'exclama en calant sa scie contre sa propre oreille comme le font les boucher avec leur crayon: ha! Un cas intéressant, c'est un labyrinthe!
Et alors! Dis-je un peu vexée, ça pose un problème?!
Que nenni fit le toubib, c'est une loterie voyez-vous, on voit de tout, chez certains ça se présente comme les rues d'une ville avec des lumières clignotantes ou des chemins champêtres et vicinaux, chez d'autres ce sont des parcs ou des couloirs et parfois même dans certains cas...c'est le désert avec du sable..Mais c'est bien, un labyrinthe, c'est plus compliqué, mais c'est bien.
Je regrettai de ne pas avoir les lumières, même clignotantes, mais me réjouis intérieurement que ce ne fut pas le désert.
Sur ce, les fouilles commencèrent, je sentais les petits bonshommes experts explorer ma tête avec la délicatesse la plus extrême et j'entendais leurs réflexions qui l'étaient moins: "V'nez voir les gars, c'est un vrai foutoir! Elle a mis tous les dossiers marrants, tout les trucs beaux et tout ce qui lui plaît en position frontale et tout ce qui l'embête à l'arrière! Même pas, ce qui l'embête est empilé en dessous! répondit un autre, on va y passer des heures et encore heureux si on ne se perd pas! Les gars, encordez-vous!
Au bout de 2 heures j'en avais un peu marre de ne pas bouger dans la crainte de faire tomber les petits experts, tout désagréables qu'ils fussent et je commençais à me sentir coupable. Je me promettais à l'avenir de ménager une vaste place à mes papiers administratifs et d'oublier les fleurs, les balades et tous les souvenirs qui m'amusaient tout en sachant parfaitement que je ne tiendrai jamais de tels engagements.
En fin de journée, les équipes sortirent harassées de mon crâne et l'heure du rapport arriva: aucun de mes dossiers de mémoire administrative n'avait été retrouvé. Hélas.
Le docteur expliqua qu'on avait repéré une légère fêlure (!) au niveau nasal qui me permet d'expulser tout ce qui me contrarie par des éternuements répétés. Il s'agit d' un cas assez rare et désespéré d'allergie à l'administration, ajouta t-il en refermant mon crâne d'un geste sec, et nous n'y pouvons rien.
Mais ces gens amoureux du classement ne lâchent jamais rien, au contraire je crois bien qu'ils prennent plaisir à harceler les pauvres malheureux dans mon genre et j'ai fini par me retrouver envahie de correspondance menaçante me promettant l'huissier, la saisie, le poste de police, et pis encore le gel de mes allocs, le retrait de mon permis de conduire et tutti quanti.
Bref j'en arrivais au point que mon entourage compatissant s'organisa pour venir m'aider à retrouver la paperasse entassée au petit bonheur la chance dans mon petit chez moi où règne un foutoir pittoresque, mais rien n'y fit et la plupart abandonnèrent au bout de quelques jours de laborieuses mais infructueuses recherches.
Y a plus qu'un truc à tenter, ont déclaré mes amis, faut faire venir un scientifique capable d'aller fouiller là-haut où tout est numérisé!
L'idée était intéressante, certainement qu'on y trouverait les endroits où j'avais pu semer les divers dossiers que j'avais si légèrement dispersés et l'homme de l'art arriva dare-dare.
"Cherchez pas, docteur, c'est là-haut que ça se passe" firent mes amis en se frappant la tempe de l'index, geste fort désobligeant à mon égard.
Je vois, dit-il, faudrait envoyer des équipes miniaturisées en passant par le vestibule, c'est une solution moins invasive...
Je protestai illico: il n'était pas question que ses troupes de choc passent (et salissent) mon vestibule: ayant toujours eu l'ouïe ultra sensible et ne supportant déjà pas d'entendre mes voisins à l'étage au-dessus, je demandai à ce qu'on ouvre la boîte.
Le docteur acquiesça, dans le fond dit-il, ça sera plus simple et on aura une vue d'ensemble.
Je vous passe les détails de l'ouverture qui est assez pénible pour celui ou celle qui la subit, mais à peine mon crâne mis à nu, le docteur s'exclama en calant sa scie contre sa propre oreille comme le font les boucher avec leur crayon: ha! Un cas intéressant, c'est un labyrinthe!
Et alors! Dis-je un peu vexée, ça pose un problème?!
Que nenni fit le toubib, c'est une loterie voyez-vous, on voit de tout, chez certains ça se présente comme les rues d'une ville avec des lumières clignotantes ou des chemins champêtres et vicinaux, chez d'autres ce sont des parcs ou des couloirs et parfois même dans certains cas...c'est le désert avec du sable..Mais c'est bien, un labyrinthe, c'est plus compliqué, mais c'est bien.
Je regrettai de ne pas avoir les lumières, même clignotantes, mais me réjouis intérieurement que ce ne fut pas le désert.
Sur ce, les fouilles commencèrent, je sentais les petits bonshommes experts explorer ma tête avec la délicatesse la plus extrême et j'entendais leurs réflexions qui l'étaient moins: "V'nez voir les gars, c'est un vrai foutoir! Elle a mis tous les dossiers marrants, tout les trucs beaux et tout ce qui lui plaît en position frontale et tout ce qui l'embête à l'arrière! Même pas, ce qui l'embête est empilé en dessous! répondit un autre, on va y passer des heures et encore heureux si on ne se perd pas! Les gars, encordez-vous!
Au bout de 2 heures j'en avais un peu marre de ne pas bouger dans la crainte de faire tomber les petits experts, tout désagréables qu'ils fussent et je commençais à me sentir coupable. Je me promettais à l'avenir de ménager une vaste place à mes papiers administratifs et d'oublier les fleurs, les balades et tous les souvenirs qui m'amusaient tout en sachant parfaitement que je ne tiendrai jamais de tels engagements.
En fin de journée, les équipes sortirent harassées de mon crâne et l'heure du rapport arriva: aucun de mes dossiers de mémoire administrative n'avait été retrouvé. Hélas.
Le docteur expliqua qu'on avait repéré une légère fêlure (!) au niveau nasal qui me permet d'expulser tout ce qui me contrarie par des éternuements répétés. Il s'agit d' un cas assez rare et désespéré d'allergie à l'administration, ajouta t-il en refermant mon crâne d'un geste sec, et nous n'y pouvons rien.
Sujet 02/2019 - du 12 au 19/01 - Mil et une, atelier d'écriture en ligne
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